Ce colloque vient, comme une interrogation, déranger la vision traditionnelle d’un Moyen Âge fixe et immobile. Sur un mode nécessairement monographique mais qui embrasse large, de l’Orient à l’Occident, les différentes contributions explorent la diversité des enjeux du thème mis à l’honneur. Le voyage solitaire de l’aristocrate ou du moine côtoie la migration économique de communautés rurales entières. Le voyage d’agrément y est étudié aussi bien que celui du professionnel. Une large place est accordée aux conditions matérielles, aux itinéraires, à l’infrastructure routière ainsi qu’à l’hébergement. Ainsi se dessine le profil de voyageurs dont les attentes oscillent entre la soif d’un savoir que nourrissent la curiosité et le difficile apprentissage de l’altérité. La route médiévale prend alors tout son sens, si différent de la nôtre qui se contente de relier deux points et de séparer aussitôt ceux qu’elle rassemble. Elle nourrit un milieu social qui est lui-même pétri de valeurs. La difficulté physique du voyage suppose que celui qui l’affronte engage son corps autant que son esprit. Des liens se nouent entre les voyageurs et les autochtones, ou encore avec les hospices destinés à les recevoir ; ils se nouent aussi entre les bêtes de trait et les hommes. Ainsi naît une culture de la route avec ses légendes, ses stéréotypes et ses saints protecteurs que sont saint Christophe puis saint Roch. Quelle perception la société a-t-elle de ces gens du voyage qui sont peu nombreux à transgresser les frontières du pays de connaissance et deviennent vite des passeurs de limites ? Cet homo itinerans a désormais, pour la période médiévale, une histoire et un devenir.